mercredi 2 décembre 2020

Ecran en veille, Enfant en éveil

un article des ateliers Gordon

 https://www.lesateliersgordon.org/post/ecran-en-veille-enfant-en-éveil

Blog Comme en Famille

Les écrans, leur utilisation, le temps passé à les regarder, l'âge des enfants sont des indicateurs qui sont surveillés de près par les scientifiques et qui nous préoccupent en tant que parents. En même temps les écrans font partie intégrante de notre quotidien et peuvent aussi être des alliés dans la dynamique familiale.


Pas simple de s'y retrouver... Comment trouver le bon équilibre tout en gardant une harmonie au sein de la famille ?

A travers cet article nous allons répondre à 5 questions que nous nous posons fréquemment :
Quels sont les impacts sur la santé ?
Quel écran pour quel âge ?
Combien de temps d'utilisation et quelles précautions ?
Comment gérer les écrans au quotidien ?
Et les parents, on en parle ?

Et retrouvez également à la fin de l'article, une conférence vidéo faite par Clarence Henry-Delhumeau, formatrice Gordon.


1 - Quels sont les impacts sur la santé ?







2 - Quels écrans pour quel âge ?





3 - Combien de temps peut-on laisser nos enfants regarder les écrans et quelles précautions ?









4 - Comment gérer les écrans au quotidien ?

a. Les quatre points essentiels :

  • Pas d'écrans le matin. Ils perturbent l'attention de nos enfants.
  • Pas d'écrans durant les repas. Profitons des repas pour partager en famille.
  • Pas d'écrans avant de s'endormir. La lumière bleue retarde l'endormissement.
  • Pas d'écrans dans la chambre. Gardons le contrôle sur la durée et le contenu.

b. Impliquer nos enfants dès que possible

Aujourd'hui les écrans font partie intégrante de nos quotidiens. L'importance de limiter leur utilisation n'est plus à démontrer. L'enjeu en tant que parent est alors de sensibiliser nos enfants au danger que les écrans représentent et qu'ils puissent être acteurs de leur consommation. Il est important de sortir de la lutte de pouvoir qui ne va susciter qu'incompréhension et donc comportements déviants.

Comment rendre nos enfants acteurs?


Prendre un temps d'échange en famille prévu et décidé en avance afin d'établir les règles d'utilisation des écrans pour chaque membre de la famille.


Vous pouvez montrer aux enfants les affiches de cet article.
Voici également un tableau permettant aux enfants de noter le temps passé aux diverses activités.

c. Développer d'autres activités à faire en solo ou à partager.

Rappelons-nous que lorsque l’enfant utilise un écran, son cerveau ressent beaucoup de plaisir et se focalise sur l’objet qui apporte ce plaisir. L’enfant a donc besoin de nous pour lui rappeler, habilement, la joie qu’il éprouve également pour les autres activités qu’il a oubliées momentanément. Cet outil va nous aider à négocier avec nos enfants le partage de son temps entre toutes les possibilités qui sont à sa portée : sports, jeux de plein air, amis, musique etc.


5 - Et les parents, on en parle?


Les Ateliers Gordon, comme d’autres acteurs de la Parentalité, veulent aujourd’hui lancer un cri d’alarme sur la place prise par ces objets dans nos vies de PARENTS, au détriment parfois de la relation et de la communication avec NOS ENFANTS.

Parce que l’on sait l’importance du lien avec son enfant : le regarder, lui parler, le toucher, être juste en connexion avec lui pour nourrir ses besoins de sécurité, de lien et d’affection. Parce qu’un enfant a BESOIN de ces signes de reconnaissance, d’être dans l’interaction. Parce que les neurosciences démontrent que le cerveau de l’enfant se développe de façon plus favorable lorsqu’un climat d’empathie et d’attention lui est donné.



Rappelons que la communication, englobe tous ces temps d’échanges verbaux et non verbaux, des regards, des gestes, un sourire, une attention à l’enfant.

Et qu’il a besoin de cela pour SE CONSTRUIRE et BIEN GRANDIR !

Lire l'article.


Pour aller plus loin...

SITES INTERNET


Lâche ton écran : www.lachetonecranasso.fr
Mon enfant et les écrans : cliquez ici
Le bon usage des écrans : lebonusagedesecrans.fr Vous y trouverez des quizz pour tester vos connaissances sur les écrans.


VIDEOS


Emission "Générations écrans, génération malade?" diffusé sur Arte - 52 minutes.
Intervention dans La maison des maternelles du Dr Duccanda " Les dangers des écrans pour les jeunes enfants" - 7 minutes
Intervention dans La maison des maternelle du Dr Duccanda "Tout-petits : alerte aux écrans!" - 7'
Intervention de Michaël Stora "Faire des écrans nos alliés dans la dynamique familiale" - 6'42


PODCAST


Emission de France Inter le Code a changé : "Sommes-nous vraiment en train de créer des crétins digitaux?" 47'


BIBLIOGRAPHIE

Vous trouverez dans cette bibliographie trois thématiques :

- les écrans et leurs conséquences.

- des idées d'alternatives aux écrans.

- sensibiliser les enfants et les ados.





dimanche 1 novembre 2020

EDUCATION ET CNV


L’association Déclic-CNV Education promeut la CNV dans les structures éducatives et auprès des familles. Sur son site, vous trouverez un large panel d’outils (vidéos, dossiers, articles) et des Webinaires gratuits ou payants.
A regarder notamment, la vidéo « Ces profs qui changent l’école ».
Une soirée d’échange avec Charlotte, l'enseignante du film, est prévue le 4 novembre à 20h30 par Zoom.



La pleine conscience

 Un article de Scholavie

La pleine conscience représente une véritable alliée en cette nouvelle période de confinement et de troubles ! 

« Il existe aujourd'hui un nombre croissant de travaux montrant l'intérêt de la méditation de pleine conscience auprès des enfants, pour l'équilibre émotionnel, les capacités de résilience, la qualité des échanges familiaux et les capacités attentionnelles, notamment dans le travail scolaire et les apprentissages »

Christophe André



Qu'est-ce que la pleine conscience ?

La pleine conscience est un « état de conscience qui résulte du fait de porter son attention, intentionnellement, au moment présent, sans jugement, sur l’expérience qui se déploie moment après moment » (Baer, Smith, & Allen, 2004). 


C'est aussi :

  • Tout simplement être avec soi, connecté à tous ses sens, une manière d’être ouvert à notre expérience telle qu’elle se présente à nous, d’instant en instant.
  • Un remède contre le stress, une pause pour apprécier le moment présent, un entraînement de l’esprit dit Matthieu Ricard. La pratique est essentielle, l’entraînement régulier nécessaire.
  • Apprécier sa vie et ses petits plaisirs, et se préparer à vivre au mieux les périodes difficiles, avec énergie et ressources.
  • Se libérer de nos pensées, qui ne sont que des pensées.
  • Une pratique (ou plutôt un ensemble de pratiques) laïque et contemporaine, validée par la recherche scientifique.


La pleine conscience, ce n’est pas arrêter de penser. Impossible, le cerveau en est incapable. Il ne s’agit pas de faire le vide : le rien en méditation est toujours plein. Il s’agit plutôt de faire de l’espace, de la place. Ce n’est pas non plus se couper du monde. C’est une manière de s’ancrer dans la relation à soi, à l’autre, au monde.

Pourquoi pratiquer la pleine conscience ?





De multiples bienfaits de la pleine conscience ont été documentés par de nombreuses recherches menées depuis trois décennies.

Elle permettrait notamment de contribuer à : 


  • Reconfigurer les interactions entre les régions du cerveau (par exemple, de renforcer les connections entre les régions impliquées dans l’attention).
  • Améliorer la santé physique et prolonger la vie.
  • Lutter contre la douleur chronique, le stress et l’anxiété.
  • Soigner la dépression et prévenir les rechutes.
  • Diminuer les risques d’épuisement professionnel.
  • Corriger le déficit d’attention avec hyperactivité.
  • Réguler les comportements alimentaires.
  • Améliorer le fonctionnement cognitif et mieux le connaître.
  • Stimuler la créativité.
  • Améliorer la qualité du travail et la productivité.
  • Contribuer à la découverte et à l’actualisation de soi.
  • Faire face aux aléas émotionnels.
  • Favoriser l’équilibre mental (attention, cognition, affect).
  • Rendre plus optimiste.
  • Assurer un certain niveau de compassion pour soi.
  • Faire grandir la spiritualité et la maturité au plan moral.
  • Favoriser l’adoption de buts intrinsèques (et non extrinsèques).
  • Augmenter l’altruisme, l’empathie, la compassion, la bonté.
  • Améliorer les relations avec autrui.
  • Augmenter l’engagement dans des comportements écologiquement responsables.
  • Donner un sens plus profond à l’existence.
  • Améliorer la qualité de vie, le bien-être et le bonheur.


Extrait de la Revue québécoise de psychologie (2014), 35(2), 1-7 –
(Fredrickson, Cohn, Coffey, Pek, & Finkel, 2008; Henry, 2013; Kabat-Zinn, 1990/2012; Langer, 2009; Malinowsky, 2013; Niemiec & Ryan, 2013; Shapiro, 2009 ainsi que les articles du présent dossier).

"Le meilleur moment pour pratiquer est maintenant"
Thich Nhat Hanh

Comment ?

Tout d’abord, il faut savoir que cet entraînement à la pleine conscience est possible, tout comme pour n’importe quelle habileté, et que cet apprentissage laisse des changements permanents dans le cerveau.

En savoir plus :
Le rapport détaillé est publié dans Brefczynski- Lewis, Lutz, Schaefer, Levinson & Davidson, 2007; on trouve un compte-rendu abrégé dans Davidson & Begley, 2012, pp. 215-218. Pour d’autres études avec des « experts » sur la méditation de compassion, voir Lutz, Greischer, Rawling, Ricard & Davidson, 2004; Lutz, Brefczynski-Lewis, Johnstone & Davidson, 2008.

Voici une expérience à vivre grâce à cette vidéo pour mieux comprendre ce qu’est la pleine conscience.




La pleine conscience est donc un ensemble d’activités que l’on peut faire pour la muscler.

Prendre conscience de sa respiration

 Respirer naturellement ou de façon profonde et amener exclusivement l’attention sur les sensations de la respiration (air qui rentre et sort, le ventre qui se gonfle et se dégonfle, etc.)

Prendre conscience de son corps 

L’exercice consiste à porter l’attention progressivement sur les différentes parties du corps, de la tête aux pieds ou inversement. C’est le fameux exercice du scan corporel.

La pleine conscience au quotidien 

Porter attention à ce que l’on voit, sent, ressent dans des gestes quotidiens (attentes des transports, jardinage, cuisine…), pendant les repas (goûts, saveurs, mastication, couleurs, etc.).

S’exercer à la pleine conscience, c’est se livrer à de nombreux exercices formels et informels. On vous propose d’utiliser le chemin de l’attention que vous trouverez sur notre site, avec tous nos outils :




Pour aller plus loin
Nos outils ScholaVie adaptés à la période de confinement et de retour à l'école
Le site internet de covid'Ailes et notamment son kit pratique d'attention  

Ouvrages
Jennings, P. (2019). L'Ecole en pleine conscience. Les Arènes.
André, C. (2011). Méditer, jour après jour : 25 leçons pour vivre en pleine conscience. L'Iconoclaste. 

Pour la pratique de la pleine conscience à l’école avec les ados (avec CD) :
Tout est là, juste là, Jeanne Siaud-Facchin , Odile Jacob
Respirez, Elise Snel, les Arènes Pour la pratique de la pleine conscience à l’école avec les enfants (avec CD) :
Petit cahier d’exercices de pleine conscience, Jouvence éditions
Calme et attentif comme une grenouille, Elise Snel, Les Arènes 

 Article
Shankland, R., André, C. (2014). Pleine conscience et psychologie positive : incompatibilité ou complémentarité ? Revue Québécoise de Psychologie, 35, 157-178.

jeudi 3 septembre 2020

Comprendre les racines de la violence éducative ordinaire et ses conséquences : un pré-requis pour des relations bientraitantes

sur le site :  https://apprendreaeduquer.fr/


conséquence violence éducative théorie de l'attachement



Je vous propose un nouveau format d’article sur le blog. Il s’agit d’interviews menées par Ingrid van den Peereboom, animatrice de l’émission radio Vers une parentalité bienveillante sur RCF et spécialiste du portage physiologique. Ses interviews donneront la parole à des penseurs et des penseuses de l’accompagnement respectueux des enfants qui aborderont des thèmes peu évoqués par ailleurs.

Aujourd’hui, Ingrid s’entretient avec Jean-Pierre Thielland. Ce dernier a été instituteur, puis enseignant spécialisé en Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED). Il a ensuite exercé les fonctions de psychopédagogue en Centre Médico-psycho-pédagogique ou CMPP. Président de l’Observatoire de la violence éducative ordinaire, Jean-Pierre Thielland aborde l’attachement et la violence éducative ordinaire dans son livre intitulé Je peux la taper… elle est de ma famille – Attachement et violence éducative ordinaire, un livre paru en 2019 aux éditions l’Instant Présent.

En France, plus de 80% des enfants sont soumis à des punitions corporelles, des humiliations ou des violences psychologiques sous forme de punitions ou sanctions diverses. La tolérance à l’égard de ces pratiques et l’absence de politique de prévention à l’échelle nationale ont un impact très lourd sur l’état de santé psychique de nombreux enfants et adolescents.

Dans son livre, Jean-Pierre Thielland évoque divers accompagnements d’enfants. Son récit est émaillé de multiples références simples et claires, très utiles à la compréhension, sur la théorie de l’attachement développée par John Bowlby, puis à sa suite Mary Ainsworth. Il a accepté de répondre à quelques questions à ce sujet, en complément de l’émission radio diffusée le 19 mai 2020 sur RCF.


Jean-Pierre Thielland, en s’appuyant sur l’éthologie, Bowlby remet en cause les principes freudiens. En quoi cela nous aide-t-il dans l’accompagnement des enfants ?

Ce sur quoi insiste énormément Bowlby, c’est l’interaction. C’est-à-dire que pour le bébé ou l’enfant, être nourri n’est pas la chose la plus essentielle pour lui assurer un développement affectif sécure et satisfaisant. Ce qui est très important, c’est le côté relationnel entre ce bébé, cet enfant et sa figure d’attachement. Et c’est quelque chose qui fonctionne dans les deux sens : la figure d’attachement apporte de la sécurité au bébé de par son acceptation, son accueil inconditionnel et, en même, temps, le bébé, par ses manifestations, – ça peut être des pleurs, ça peut être un sourire, un appel du regard -, va faire résonner, faire vivre en fait, chez la mère ou chez le père, cette attention. Il va éveiller l’attachement du parent à son égard. L’enfant mobilise des affects qui vont faire en sorte que le parent va s’approcher et répondre à sa demande.

Bowlby a souligné l’importance de cette dimension interactive innée, contrairement à la théorie freudienne qui plaçait au premier plan le nourrissage du bébé. Freud n’a pas insisté comme Bowlby sur la primauté accordée par le bébé à la relation, à la qualité du lien avec la figure d’attachement et à l’importance de cet aspect interactif de la relation.



Vous évoquez un petit Alexandre qui intériorise l’idée que c’est parce qu’il fait des bêtises qu’il est frappé et puni. Il justifie ce qu’on lui fait et donne un sens à son vécu pour comprendre le monde. 

Oui, et aussi pour avoir une place. Un jeune enfant ne peut pas imaginer que son parent est en train de lui faire violence et de le maltraiter. C’est impossible. La théorie de l’attachement nous dit justement que, pour un enfant, c’est extrêmement important qu’il identifie son père ou sa mère comme des personnes sécures sur qui il peut compter. Et que lorsque son attitude, quelle qu’elle soit, va déclencher chez son parent une réponse qui sera insécurisante pour lui, il va organiser son fonctionnement pour que ça n’arrive plus ou le moins souvent possible. Donc il va faire en sorte de ne pas susciter de manifestation de réprobation chez son parent. C’est une première chose.

Et puis, pour que ça ait du sens pour lui, il va se servir du phénomène du déni pour justifier ce comportement, faire sens de ce comportement, en intériorisant l’idée que c’est de sa faute. Le déni lui permet de conserver une représentation acceptable de son parent. Et c’est lui qui provoque, par son comportement, les manifestations effrayantes et violentes de son parent. Et bien souvent, il y est invité par les paroles des parents, qui peuvent dire à l’enfant qu’il les pousse à bout, qu’il exagère, qu’il est insupportable, qu’on ne peut rien faire de lui, toutes ces expressions qu’on peut entendre chez les parents qui leur permettent pour eux-mêmes aussi de justifier leur propre violence. Et ça va aussi dans les deux sens, c’est-à-dire que ça va inciter l’enfant à endosser la responsabilité de la violence qui lui est infligée. C’est extrêmement pervers, mais c’est vraiment très important à identifier.

Ce système de maltraitance, de violence devient presque un système qui s’auto-alimente, à la fois du côté du parent et à la fois du côté de l’enfant. S’il n’y a pas une personne dans l’entourage de l’enfant qui peut lui faire sentir, qui peut même lui faire comprendre que ce qui se passe n’est pas normal, il va s’identifier à ce comportement. Il va en faire un signe pour lui d’appartenance et d’identification à sa famille. Il va accueillir ce mode relationnel basé sur la violence et en faire une composante de sa personnalité. À l’école, s’il rencontre un garçon qui fonctionne plus dans l’empathie ou qui réagit différemment de lui, ça peut susciter en lui de l’agression. Ça le remet en face de ce qu’il vit et de ce qu’il a élaboré comme fonctionnement plutôt du côté d’une réponse violente. Et constater qu’un enfant réagit différemment, dans la cour de récréation par exemple, ça peut susciter chez lui de la violence. Ça peut le pousser à être agressif avec cet enfant qui n’est pas sur le même fonctionnement que lui. C’est une reproduction de la violence du parent, qui lui-même reproduit la violence qu’il a subie quand il était enfant.


Pour sortir de ce système, il est nécessaire de passer par de nombreuses prises de conscience. 

Oui. C’est très important et c’est très difficile. J’entends la prise de conscience au sens où l’entend Alice Miller, c’est-à-dire une prise de conscience qui soit émotionnelle, pas uniquement intellectuelle. Ce qui est important pour un adulte quand il devient parent, c’est d’avoir cette possibilité d’identifier ce qu’il a vécu, lui, en tant qu’enfant comme étant potentiellement maltraitant, qu’il puisse avoir un espace, une rencontre avec quelqu’un où il va pouvoir à la fois verbaliser ce qui lui est arrivé – pouvoir décrire la situation de manière factuelle, pouvoir essayer d’identifier les différentes personnes – d’une part et surtout de pouvoir, autant qu’il peut, récupérer un certain nombre des émotions et des sensations qu’il a ressenties, ce que ça lui a fait à ce moment-là dans la situation de violence qu’il a subie. Il s’agit pour lui de se réapproprier quelque chose qu’il n’a pas pu exprimer à ce moment-là et de pouvoir le partager avec quelqu’un. Ça peut être un thérapeute, mais aussi quelqu’un de proche, un ami… Et du coup, ce vécu de violence, avec les émotions et la souffrance qui s’en est suivie, peut occuper une autre place.

La personne n’est plus agie par cette violence, mais elle en a un souvenir, une mémoire autobiographique. Ceci signifie : je peux resituer ce qui m’est arrivé dans ma mémoire, je peux en parler, je sais que ça m’est arrivé, je sais que ça n’était pas normal, je sais que j’ai souffert et je sais aussi que je n’ai pas envie de refaire la même chose avec mon enfant. Donc cette nouvelle mémoire, cette histoire qui est intégrée à ma personne, dans ma mémoire psychique, dans ma mémoire émotionnelle, voire même dans ma mémoire corporelle, elle devient un repère pour moi. Quand je vais être à mon tour parent et que l’attitude de mon enfant va allumer cette violence, je saurai l’identifier pour ce qu’elle est, c’est-à-dire ce qui m’est arrivé et que j’ai en moi de douloureux, de violent éventuellement. Mais je ne vais pas l’adresser à mon enfant d’une manière immédiate et violente. Je vais avoir un réflexe, une lumière qui va s’allumer pour dire : Ah oui là, attention ! Il y a une fragilité. Je fais attention à ce que je vais faire avec mon enfant. Ça permet de ne plus être l’objet de sa propre violence et de ne pas la reproduire.

Pour moi, c’est une façon à la fois indispensable de sortir du phénomène du déni, qui a eu son utilité à un moment donné dans l’enfance, mais qui devient un empêchement à rejoindre son enfant si on devient un jour parent. C’est l’essentiel à mes yeux pour permettre de sortir de cette reproduction de la violence. En ce qui me concerne, j’ai beaucoup lu les livres d’Alice Miller, qui m’ont énormément aidé, parce que derrière les mots d’Alice Miller, il y a une résonance émotionnelle. Son écriture a cette particularité de nous mettre en lien avec nos émotions, avec notre histoire et il peut y avoir un véritable travail : c’est presque une écriture thérapeutique. Ses livres nous permettent justement de nous remettre en lien avec cette histoire passée et d’y trouver un sens qui nous rapproche de notre enfant maltraité, notre enfant intérieur et qui, du coup, va nous aider à nous mettre en lien avec notre propre enfant si un jour on est parent. Le processus de lecture peut aider à cette prise de conscience. J’aime beaucoup le cinéma et il y a aussi des films qui sont importants. Il y a un très beau film américain intitulé La nuit du chasseur, de Charles Laughton, sorti en 1955, où on a justement à la fois la cécité émotionnelle des adultes proches des enfants, le prédateur et le témoin secourable et la capacité des enfants à trouver de l’aide. Il y a évidemment le film de Michael Haneke, plus récent, sorti en 2009, intitulé Le ruban blanc, qui montre bien aussi le processus de répétition de la violence. Donc c’est important de pouvoir se saisir sur sa route de témoin lucide, de tuteur de résilience, comme le dit Boris Cyrulnik, pour pouvoir sortir de cet enchaînement, de cette répétition. 



Que fait ce témoin secourable ? Il apporte un regard ? Il verbalise des choses essentielles ? 

Il offre une sensibilité et une écoute sensible. Il va avoir une attitude qui va permettre que la parole de celui qui s’exprime puisse se déployer dans sa totalité. Il ne va pas juger. Il ne va pas forcément donner de conseils non plus. Il va essayer d’ouvrir des pistes pour que le maximum d’émotions puissent avoir une place, s’exprimer dans toute leur richesse et en toute liberté. Cet espace est important, que représente le témoin secourable. Ça peut être de la parole et, avec les enfants, ça peut être le jeu. Dans le livre, je montre bien comment cette petite fille s’empare de tout son imaginaire, sa créativité pour raconter et revisiter des histoires qui lui sont arrivées, avec des émotions, avec du corps. Avec les enfants, c’est possible de faire ça. Avec un adulte, ça sera peut-être au niveau de la parole et aussi des émotions, l’expression, des larmes, peut-être aussi la colère. Donc c’est vraiment ce rôle du témoin secourable qui ouvre la porte aux émotions, à l’histoire passée, en offrant sa capacité d’écoute et tout ce que peut avoir vécu un enfant dans son histoire. Et ça peut être absolument terrible. On ne va pas minimiser non plus, dans l’idée que ça pourrait être rassurant. On ne va pas chercher non plus à rassurer l’autre, mais être disponible à tout ce que la personne a à exprimer de sa souffrance et de son histoire. Pour moi, ça serait vraiment ça, les qualités d’un témoin secourable, d’un témoin lucide.



Vous évoquez la délicate situation de l’accompagnement d’une petite fille dont on vient de parler. Vous manifestez que la mère refuse de s’impliquer autant que vous lui en donnez la possibilité. 

Oui. Je dis qu’en fait, elle n’arrive pas à changer des choses dans son comportement, dans sa posture de mère autoritaire et violente. Elle ne veut pas du tout ni interroger la légitimité de cette attitude, bien-sûr, et en plus, surtout, ne pas non plus y apporter un changement. Mais ça, c’est ce qu’elle dit. Et je ne sais pas si le fait que je lui donne des informations sur ce que je pense être nocif et contre-productif dans son attitude dans sa manière “d’accompagner” sa fille quand il y a des devoirs à faire à la maison est opérant. Elle entend des choses. Après, je ne sais pas ce qui se passe en elle, comment ça peut travailler. En tous cas, je lui délivre des informations sur ce que je pense être nocif dans son attitude. En ma présence et avec moi, il n’y a pas vraiment de dialogue. Elle reste sur ses positions.

Vous n’avez pas le même objectif, en fait. Elle veut de la réussite scolaire et vous cherchez le bien-être de la petite fille d’un point de vue global.

Oui. Mais je pense que la réussite scolaire, ça procure du bien-être à la petite fille aussi, malgré tout. C’est comme ça pour elle. Elle va à l’école. Elle n’a pas le choix. Ses parents ont décidé qu’elle allait à l’école. Et donc, cette petite fille fait avec ça. Si ça se passe bien à l’école pour elle, ça va lui apporter du bien-être. Je suis aussi dans cet objectif, même si ce n’est pas l’essentiel, même si je pense que ça viendra de toute façon si cette enfant arrive à pouvoir s’ouvrir, être en lien avec elle-même et exprimer tout ce qu’elle est, tout ce potentiel dont elle dispose, qui est extrêmement riche et qui ne soit pas victime de la répression du côté de sa famille, du côté de sa mère. De ce côté, mon inquiétude était en fait ce comportement de passage à l’acte. Au CMPP (Centre médico-psycho-pédagogique), il arrivait quand-même parfois que les familles ne viennent plus et j’avais un peu l’inquiétude que cette mère interrompe l’accompagnement. J’ai (quand-même) aussi travaillé cette peur en moi et donc sans doute que je n’ai pas été trop insistant sur une collaboration, un engagement plus soutenu de la part des parents. C’est toute la dynamique de ses propres peurs quand on est un clinicien : comment on fait avec ça ? J’en parle un petit peu dans le livre quand cette mère me dit : moi, j’ai été élevée comme ça et que je n’en fais rien. Je la laisse avec cette affirmation, comme si elle présentait une porte fermée et qu’il ne fallait pas franchir cette porte. Ça risquait de la fragiliser, de la mettre en difficulté et qu’elle claque la porte, du coup. Et donc, je ne suis pas allé investiguer là-dessus. Je suis resté comme ça parce qu’il y avait en moi une inquiétude que cette mère arrête tout en disant Ça sert à rien, le CMPP, et donc moi je veux lui faire faire – comme elle faisait – du travail scolaire en plus. Elle s’est quand-même un peu engagée. Elle n’est pas venue à tous les rendez-vous, mais elle est quand-même venue. Elle a accepté mon projet affirmé de travailler sur la confiance en soi, sur l’expression des émotions. Ce sont des choses qui ont été dites. Même si ça ne correspondait clairement pas à ses attentes, elle a quand-même accepté que sa fille vienne voir un psycho-pédagogue une fois par semaine pour l’amélioration pour elle du travail scolaire. Tout cela est assez subtil. Et ce qui est remarquable dans cette situation, – parce que ce n’est pas fréquent – , c’est que je trouve que cette petite fille a réussi à faire bouger des choses dans sa famille. Des choses ont bougé. Cette fameuse histoire de cette sœur dont il était interdit de parler, avec qui elle ne pouvait plus avoir de contacts, ce sont des choses qui ont évolué, justement, au cours du processus de soin et aussi à la fin. Cette petite fille a peu à peu construit cette assurance au travers d’une légitimation dans l’espace de soin de ce qu’elle avait à dire, des émotions qu’elle avait à exprimer, de ses plaintes, de ses reproches. Tout cela a pu se déployer et être accueilli. Ça lui a permis de se construire des repères internes sécures et de pouvoir sans doute affronter des choses qu’elle n’était peut-être pas en capacité d’affronter à un moment donné, trop submergée par les reproches qu’elle était en difficulté scolaire, qu’elle ne travaillait pas assez, etc. Tout cela a été complètement remis à une autre place : elle a pu se rendre compte d’une part qu’elle était véritablement compétente pour apprendre à lire, – ce qui était bien entendu évident – et, du coup, ouvrir la place pour tous les autres aspects de sa personnalité : la créativité, la possibilité de pouvoir exprimer ce qui la préoccupait, voire aussi les reproches qu’elle pouvait faire concernant la manière dont ses parents se comportaient.




Vous évoquez dans votre livre Mary Ainsworth, qui observe trois types d’attachements et qui établit une classification. Elle observe des bébés à l’attachement insécure, ambivalent pour un premier groupe, évitant pour le deuxième groupe et sécure pour le troisième. Dans quelle mesure cette grille d’analyse vous aide-t-elle lorsque vous accompagnez un enfant en difficulté ? Et par exemple dans l’histoire de cette petite fille ?

Elle n’était pas dans l’évitement. Ce n’était pas une petite fille qui ne demandait pas d’aide. Elle pouvait solliciter sa mère. Mais en même temps, elle avait des réponses qui étaient plutôt insatisfaisantes. Elle était un peu entre deux. À la fois, elle avait des réponses de son parent qui alimentaient chez elle de l’angoisse et de l’anxiété et qui pouvaient en même temps l’inviter à ne plus demander d’aide. Je crois qu’il y avait les deux : à la fois un attachement qui était du côté de l’évitement et aussi un attachement qui était du côté de l’anxiété. À un moment, elle me dit quelque chose qui se passe à la maison autour du travail scolaire, et elle ajoute mais je veux pas que tu en parles à ma mère. Il y a en elle une conscience qu’il y a des choses qui ne peuvent pas être partagées avec ses parents, parce que ça risque de se retourner contre elle, de provoquer du rejet, des reproches ou bien quelque chose qui serait de l’ordre d’une désappartenance, une espèce de trahison, de remise en cause du fonctionnement familial. Dire qu’elle n’est pas contente, pas satisfaite de ce qui se passe à la maison pourrait lui être reproché comme étant un signe de désappartenance. 



Il n’y a pas d’espace pour un débat au sein du système familial, donc la remise en cause ne peut se faire qu’en aparté. 

Oui. J’ai compris cela comme une prise de conscience de cette petite fille de ce qu’il était possible de mobiliser du côté de ses parents et de ce qu’il était absolument indispensable de laisser à l’intérieur de l’espace dans lequel elle travaillait. C’était remarquable. C’était sa manière à elle de s’approprier l’espace de soin et de ne pas peut-être le fragiliser en y allant trop vite ou trop fort. Il y a vraiment une intelligence émotionnelle de cette petite fille qui lui fait repérer ce qu’il est possible de faire bouger dans sa famille et ce qu’elle va garder pour elle, en elle. Peut-être qu’un jour elle fera bouger les choses. Mais en tous cas, pour l’instant, pour elle, c’était une limite à ne pas franchir. Elle a senti ça comme ça.



Et donc le dialogue avec vous, qui étiez son témoin secourable, lui permet de sentir qu’elle ne porte pas des choses indicibles toute seule ?

Oui, absolument. Ça aussi, c’est important, parce que la violence éducative attaque aussi la parole. Le fait de mettre des mots, le fait de pouvoir parler, de pouvoir raconter la réalité des choses, avec la réalité de ce qui est ressenti de ce qui est vécu, permet vraiment d’avoir une parole vraie, authentique, incarnée, en lien avec ses émotions, avec son corps et c’est une espèce de victoire, une réappropriation de sa propre parole, au-delà des injonctions des parents qui peuvent dire : C’est de ta faute si on est obligés de te donner une fessée ; c’est parce que tu es paresseuse. Si on est obligés de te faire travailler plus à la maison, c’est parce que tu ne travailles pas bien à l’école, toutes ces injonctions et ces mots qui contaminent la pensée, la parole, sa propre parole et la façon dont on doit entendre la parole de l’autre. Tout est contaminé par une prétendue responsabilité de la violence qui nous est infligée et de la culpabilisation aussi, voire de la honte.

Serge Tisseron, dans son dernier livre, Mort de honte, (Éditions Albin Michel, 2019), un livre autobiographique, dit que la honte empêche de penser. Donc cette petite fille a aussi, au travers de l’indicible, fait une reconquête de sa capacité de penser et de sa capacité de se réapproprier un parler vrai. J’ai trouvé ça fabuleux ! C’est un grand bonheur d’assister à cet éveil qu’elle fait, quelque chose qui est du côté de la joie, de la créativité, d’une authenticité de cette personne, de cette petite fille. L’indicible est fortement égratigné.



Et donc, quand vous êtes témoin de cet éveil, c’est l’instant où l’enfant comprend qu’il est – je vais faire allusion à un film – “imbattable”, même s’il a grandi dans un univers où tout tendait à lui faire croire qu’il était “battable”.

Tout à fait ! Ça se passe en Suède, Même qu’on naît imbattables ! (2018). En France, les enfants sont très seuls. Pour moi, ils sont abandonnés, maltraités par l’institution, par cet abandon, justement. Et donc, effectivement, j’imagine que cette petite fille a pu se construire un repère à l’intérieur d’elle-même, qui lui a fait prendre conscience qu’elle était imbattable, c’est-à-dire qu’il n’y avait aucune légitimité à ce qu’elle soit punie, frappée, malmenée verbalement à la maison et qu’elle avait tout à fait droit à être en sécurité à l’intérieur de son domicile familial, avec son intégrité physique et psychique. C’était un droit, en fait. Elle a peut-être fait cette expérience dans cet espace de soin du CMPP d’une expression très large de tout ce qu’elle pouvait avoir à dire et à exprimer sans sanction, sans répression, etc.

Je pense au moment où elle a manifesté, au tout début où on se voyait, des attitudes très autoritaires dans la manière dont elle jouait par exemple. Et c’était intéressant qu’elle fasse cette expérience de pouvoir déployer aussi cette manifestation autoritaire un peu intrusive. Elle avait tellement peur de perdre dans des jeux à règles qu’elle m’empêchait de jouer ou qu’elle jouait à ma place : des comportements que j’interprétais comme étant un signe de ce qu’elle pouvait subir à la maison. Mais en même temps, il n’y a pas eu de retour de ma part du côté de l’”éducatif ”, comme par exemple : Quand on joue, il faut aussi savoir perdre. Ce n’était pas le but.



Le jeu est une occasion pour vous de l’observer ?

C’est une occasion de m’inscrire dans son jeu à elle, c’est-à-dire d’occuper une place dans ce qu’elle a envie de raconter. Et dans le fait que je me prête à ce besoin qu’elle avait de tout maîtriser, par exemple. C’était ça, mon jeu à moi, tout en le lui disant, bien entendu. Il y a des mots qui sont apportés à ce moment-là, qui décrivent la situation : Ah ben là, tu joues à ma place ; tu veux pas que mon pion soit le premier ? Mais je joue son jeu. Je ne joue pas vraiment, pas comme quand on joue avec les enfants en famille. C’est juste un prétexte, une médiation pour lui permettre d’exprimer des choses en toute sécurité.



Parce que le jeu est quelque chose de connu ?

Oui. Le jeu, c’est extrêmement riche : à la fois les jeux à règles et les jeux qu’elle a pu aussi déployer avec ses petits personnages, voire en jouant un rôle elle-même et en me faisant moi aussi jouer un rôle. Il y a du corps, il y a quelque chose de différent. Le jeu, c’est fantastique pour pouvoir exprimer des difficultés, des émotions, des questions…



Il y a une part d’insaisissable quand on accompagne un enfant. Avez-vous pu percevoir si elle était moins frappée autour des moments de travail scolaire à domicile vers la fin de l’accompagnement ?

Au fil des séances, elle a manifesté son désagrément par rapport au fait qu’elle continuait de faire du travail à la maison. Presque à la fin des séances, quand elle apprend qu’elle va passer dans la classe supérieure, – ce qui était une demande insistante de sa mère – , elle est à la fois contente et rassurée parce que c’est une étape qui va être franchie et, en même temps, elle dit son inquiétude, mais elle n’évoque plus les violences. Et puis elle évoque aussi cette fameuse nouveauté où sa sœur va pouvoir revenir dormir à la maison. Elle est du côté du soulagement, du changement qui est en train de s’opérer et qui va dans le sens de ses attentes, avec quand-même une inquiétude par rapport à cette scolarité tellement appuyée par sa mère. Dans les dernières séances, elle n’en parlait plus, alors je ne sais pas. Je n’ai pas la réponse. C’est insaisissable.



On n’a pas toujours de feed-back sur ce qu’on fait.

Je ne sais pas non plus ce que cette mère a fait de ce que j’ai pu lui dire, des informations que j’ai pu lui donner, sur le côté toxique de son attitude éducative, de cette violence éducative. Je ne sais pas du tout ce qu’elle en a fait. On peut constater des choses : le fait que cette grande sœur ait été autorisée à revenir dormir à la maison ; dans un entretien avec la mère, alors qu’on a fait quelques séances, cette mère dit qu’elle a remarqué que, effectivement, sa fille avait un peu plus confiance en elle. S’ajoute l’histoire de la piscine, où Mélanie ne veut pas faire de la compétition. Elle a peur ou elle a mal au ventre. Donc cette petite fille n’est quand-même pas totalement dans la soumission. Elle résiste. Dans cette situation où elle va apprendre à faire de la natation, mais où c’est encore pour faire de la compétition, avec tout ce que ça implique, elle a quelque chose aussi en elle qui fait qu’elle ne veut pas y aller. Elle résiste aux injonctions de cette famille qui l’inscrit toujours dans des processus qui sont maltraitants, ou en tous cas qui vont à l’encontre de ses besoins et de ses désirs. Donc c’est maltraitant.



Il y a souvent un conflit entre la reconnaissance des besoins et des désirs des enfants et le fait que, souvent, des parents se projettent dans l’avenir et veulent construire une carrière pour leur enfant et ont du mal à le regarder tel qu’il est, aujourd’hui, dans le présent tout simplement.

Oui. Il y a un manque de confiance. Ma représentation, c’est qu’il suffit d’accompagner l’enfant, d’être là dans ce qu’il a, lui, à déployer, à montrer, à découvrir, à partager, à nous faire découvrir, à nous apprendre. Il y a vraiment cette idée interactive de se laisser aller à l’accompagnement d’un enfant. Or, le rapport de pouvoir est extrêmement présent : beaucoup de parents ont peur que leur enfant prenne le pouvoir. Et ça vient de leur éducation, évidemment. Ils ne font pas confiance à l’enfance. Ils imaginent que leur enfant va chercher à les manipuler, à prendre toute la place. Du coup, ils vont mettre en place des interdits, des injonctions qui ne sont pas au service de l’accompagnement de l’enfant, mais qui sont au service de leur peur, qui vient de leur propre histoire. Ils sont en fait manipulés par cette histoire-là. Ils n’ont pas clarifié les incohérences de ce qu’ils ont eux-mêmes subi. Du coup, c’est ça qui continue de fonctionner quand eux-mêmes sont parents. Ils se privent de choses fantastiques. C’est ça qui est triste. Ils empêchent tout un processus extrêmement riche fait de choses joyeuses et moins joyeuses qui font aussi partie de la vie. Ils sont malheureux et les enfants sont malheureux.



C’est une fuite en avant parce qu’ils n’ont pas fait la paix avec leur enfant intérieur ?

Ils l’ont un peu abandonné, en fait. Ils ne lui ont pas ouvert la porte. Ils ne lui donnent pas la parole. Ils le font taire. Cet enfant intérieur pourrait prendre la parole, les aider et leur servir de guide dans la façon dont ils pourraient être avec leur enfant quand ils sont parents. Mais si cette clarification dont je parlais plus haut n’a pas été faite, cet enfant intérieur n’est pas le bienvenu. Il reste enfermé dans une crypte, avec une histoire de maltraitance qui n’a pas été identifiée comme telle. C’est le fameux livre d’Alice Miller, C’est pour ton bien : soit intégrer que J’ai eu des fessées et je n’en suis pas mort, comme ils disent parfois, ou Ça m’a même fait du bien ! C’est une façon de faire taire l’enfant intérieur que de ne pas lui donner la parole et de continuer à le maltraiter. C’est terrible. Et ça empêche d’être un parent suffisamment bon (cfr. Donald Winnicott), en tous cas une figure d’attachement sécure avec son enfant, alors que cette capacité d’occuper cette place est tellement agréable et riche, très nourrissante pour soi, dans cette dimension d’accueil de l’enfant avec ce qu’il est et ce qu’il a à nous raconter et à nous faire découvrir de lui. 

…………………………………

Source : Je peux la taper, elle est de ma famille : attachement et violence éducative ordinaire de Jean-Pierre Thielland (éditions L’Instant Présent). Disponible en médiathèque, en librairie ou sur internet (site de l’éditeur).

mercredi 2 septembre 2020

Un salut personnalisé le matin


 Comme vous pouvez le découvrir dans la vidéo ci-dessus, tous les jours, Barry White Jr. A, un instituteur américain dit bonjour d’une manière résolument cool à ses quarante élèves de CM2. Filmé par « ABC News » dans son école primaire Ashley Park PreK-8 à Charlotte, en Caroline du Nord, on découvre cet enseignant d’anglais échanger un salut personnalisé avec chacun des enfants, « check » et mini choré à l’appui.


« L’objectif de ce rituel est d’avoir un impact positif sur les élèves. Ils viennent de milieux difficiles, c’est important que chacun d’entre eux se sente spécial. Il ne faut jamais sous-estimer la valeur d’une relation, avec qui que ce soit », a confié Barry White Jr. A à la chaîne de télévision WCNC. « Au départ, c’était juste avec un ou deux élèves puis c’est devenu contagieux. Je me suis rendu compte que c’était important pour eux. Et puis, avant que je puisse leur apprendre quelque chose, ils doivent m’accepter », a-t-il poursuivi.


lundi 31 août 2020

Pour une rentrée en douceur




La choré des émotions


3 élèves expriment chacun à leur tour une émotion avec un geste et un mot. Ils reprennent ensemble ces 3 mots assortis des 3 gestes et cela forme une chorégraphie que les autres reprennent ensuite. Cela peut former la chorégraphie de la semaine que vous reprenez ensemble quand vous retrouvez vos élèves, etc.


Rituels de la gratitude 
 Ce que j’ai aimé aujourd’hui, cette semaine, ce mois-ci et/ou ce pour quoi je suis reconnaissant. Les exprimer avec un mur de la gratitude, une boîte de la gratitude, un journal de la gratitude (individuel et/ou collectif).

Identifier les forces de chacun
Les siennes, celles de ses élèves, collègues, celles de la classe, etc. Les célébrer, les développer au quotidien, par exemple avec notre outil « Autour des forces » !

Prendre le temps 
De passer un bon moment ensemble, d'organiser des tournées d'encouragements mutuels et de se connaître : voir nos outils comme La Spirale du bonheur et le Le jeu du lien.

Formuler des consignes négatives tournées à la forme affirmative

Pour plus d'impact, exemples :
Ne dis pas ça ->Tu sais le dire autrement alors à toi de jouer !
Ne pleure pas -> Tu es triste, en colère? Tu as besoin d’en parler?

Autant de rituels pour créer un climat de classe serein, positif et favorable aux apprentissages. Mettre en place un climat de classe favorable aux apprentissages, c’est aussi établir un cadre de référence commun, adopter une posture bienveillante, et organiser l'espace de la classe en conséquence.

La suite sur Scholavie.fr

jeudi 23 juillet 2020

Les OBSTACLES A LA COMMUNICATION : Repérez les « vôtres » !!!!

https://www.lesateliersgordon.org/post/les-obstacles-a-la-communication-repérez-les-vôtres


« Tu n’es vraiment pas sage » - « Allez, ne t’inquiètes pas, tu verras, demain sera un autre jour », « Fais tes devoirs tout de suite ! », « La prochaine fois tu rendras ton devoir à temps !! ».


Thomas Gordon a appelé OBSTACLES à la communication, les procédés qui – quand ils sont utilisés quand il y a de l’émotion dans l’air – coupent le flot de la communication avec nos enfants – au risque de faire du mal à la relation – et pour certains obstacles de casser l’autonomisation et l’envie de coopérer des enfants.

Par exemple, quand nous sommes dans l’émotion, on peut être tenté de Juger, Etiqueter, Donner des solutions, Ordonner, …

Quand notre enfant est dans l’émotion, on peut être tentés de le Rassurer, Minimser, Faire de l’Humour, Donner des solutions..

Les repérer c’est déjà clé... Se rendre compte quand on les utilise c’est la première étape !! Et puis petit à petit on les utilise de moins en moins .. et nos relations s’enrichissent.





Et vous.. quels sont vos obstacles « préférés », ceux que vous utilisez le plus ?
Quels sont ceux que vous ne supportez pas qu’on utilise avec vous ?

A chacun ses habitudes.. PAS DE PANIQUE – nous ne sommes pas parfaits !! Il ne s’agit pas de s’interdire de les utiliser à jamais. Certains sont à proscrire absolument car ils font vraiment du mal à l’estime de soi de l’enfant.

Etiqueter, Faire Honte, Humilier... cela vaut le coup de se déshabituer et cela passe parfois par se demander d’où ils nous viennent…

Mais pour les autres, l’important est déjà de se rendre compte qu’on les utilise.. et ainsi, les utiliser de moins en moins.. Mais alors par quoi les remplacer ??

QUE FAIRE si on ne peut utiliser les Obstacles à la Communication ?

Lorsque nous sommes dans l’émotion, quand nous avons un problème : la solution est de faire un Message Je. Il nous permettra de dire ce que nous ressentons de façon audible, sans faire du mal à l’autre et en se donnant toutes les chances d’une future collaboration.

Lorsque l’enfant a un problème ! Adopter l’une de ces réponses en voulant l’aider provoque souvent l’effet inverse ! Empêché de s’exprimer l’enfant ne peut prendre une décision et régler son problème.

En tant que parent il nous est difficile d’entendre que notre enfant à un problème, comment s’empêcher de voler à son secours ? On le rassure pour l’apaiser, le conseil pour le guider au mieux, on lui dit quoi faire, on le met en garde pour son bien !

« Ah si je pouvais effacer ton problème d’un coup de baguette magique pour que tu te sentes mieux !»

Faute de pouvoir magique nous disposons malgré tout d’un fabuleux outil qui peut faire bien des miracles … l’Écoute Active !

Recevoir simplement ce que l’enfant à a dire ou l’inviter à en dire davantage suffisent bien souvent à faire parler notre enfant. Senti pleinement écouté, son problème à de l’importance à nos yeux, il ose et se sent assez fort pour trouver une solution à son problème !

Pour en savoir plus sur l’Écoute : L’Écoute Active.

Les 12 obstacles de la communication sont des réponses typiques, des vieux réflexes qui une fois repérés et compris finissent par disparaitre, cela nécessite du temps… et cela vaut le coup !!

mardi 21 juillet 2020

DU CONFLIT A LA COCREATION : faire le premier pas dans l’écoute

"Quand je regarde les conflits que j’ai vécu ou ceux que j’ai pu observer, je remarque qu’à chaque fois le ton est monté parce qu’il n’y avait pas d’écoute. Si je ne suis pas entendu, je vais hausser le ton pour me faire entendre. L’autre n’étant pas entendu il va faire de même. Et nous pouvons ainsi escalader les marches du conflit jusqu’à la violence verbale ou physique... parce que nous avons un besoin criant d’être entendu.

J’ai fait ce dessin pour me rappeler que dans un conflit, en réalité, je n’ai pas le pouvoir de faire que l’autre m’écoute en revanche j’ai le pouvoir de m’écouter et d’écouter l’autre.

Si l’autre est entendu, il n’a plus besoin de crier. Si il est pleinement entendu cela augmente grandement les possibilités qu’il ait l’espace d’écouter ce qu’il se passe pour moi. Ce n’est pas garanti bien sûr et si je sens poindre en moi la crainte de ne pas vivre de réciprocité dans l’écoute ( « c’est toujours moi qui écoute, lui n’écoute jamais !" « « moi je veux bien l’écouter si il m’écoute d’abord ! »), je peux me rappeler que l’autre n’est qu’une stratégie pour que je vive mon besoin d’écoute et que j’ai d’autres stratégies à ma disposition pour prendre soin de moi ( m’écouter avec empathie , me faire écouter avec empathie par une autre personne plus tard... ) . Du coup, dans la conscience que mon besoin d’écoute n’est plus dépendant de la personne avec qui je suis en conflit, je peux choisir en conscience de faire le premier pas et de l’écouter en premier . Non pas depuis l’exigence d’être écoutée profondément en retour , mais depuis la conscience que l’on a tout les deux un besoin d’être entendu et que je ne suis pas obligé de subir le manque d’écoute .

J’ai le pouvoir de prendre soin de moi et de nous en apportant de l’écoute dans cette relation. En écoutant en premier, je m’offre l’opportunité d’être touchée par ce que l’autre vit et j’augmente ainsi nos chances de transformer ce conflit en occasion de cocréation mutuelle au service de nos besoins à chacun.
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Si cela peut vous soutenir pour accueillir vos émotions et rencontrer vos besoins et ceux de vos proches, les cartes "60 besoins illustrés" et "25 émotions et ressentis illustrés" sont téléchargeables avec une participation consciente ici :
Pack 60 cartes besoins illustrés :
Pack 25 émotions et ressentis illustrés :
Pour télécharger « Le livre pour défouler tes chacals » c’est par ici : https://gum.co/BnPcf
Et pour télécharger un pack de 6 illustrations des étapes du processus CNV, c’est ici : https://gum.co/CoknI
Et si le contenu de cette page contribue pour vous et que vous souhaitez soutenir la création et le partage de ces visuels, vous pouvez contribuer sur la page de financement participatif d’Apprentie Girafe https://fr.tipeee.com/apprentiegirafe


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samedi 27 juin 2020

Se libérer de la crainte d’être jugé.e par les autres



6ième article d'une série sur le développement de la compréhension de nos enfants.paru dans le blog "Ateliers Gordon" (Article publié initialement dans l'Ecolomag #77 dont le thème principal est l'immunité.)





Carl Rogers, créateur du courant de la Psychologie Humaniste, s’est posé la question suivante : quelles sont les caractéristiques des relations qui sont une aide et qui facilitent la croissance ?

Il a énuméré 10 caractéristiques dont nous avons débuté l’exploration. Or voici que l’une d’entre elle, la 9ième, nous parle précisément d’Immunité ! Retrouvez les autres caractéristiques en bas de la page. Il nous demande :

« Puis-je me libérer de la crainte d’être jugé par les autres ? »

Ne serait-ce pas merveilleux : s’immuniser de la crainte d’être jugé par des autres ?!
Et nous sentons bien là les nombreux effets miroirs. Si j’arrive à m’immuniser alors peut-être pourrais-je offrir à mes enfants un environnement dans lequel ils seront aussi libérés de cette crainte !!

Carl Rogers nous fait part de ses observations :

« Presque dans toutes les phases de notre vie (à la maison, à l’école, au travail), nous dépendons des récompenses et des punitions qui sont les jugements d’autrui : « c’est bien », « c’est méchant », « cela vaut dix », « cela vaut zéro ». De tels jugements font partie de notre vie depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse. Comme tout le monde je me surprends trop souvent à porter de tels jugements. Mais, d’après mon expérience, ils ne favorisent pas le développement de la personnalité et par conséquent je ne crois pas qu’ils fassent partie d’une relation d’aide.

C’est assez curieux, mais un jugement positif est aussi menaçant en fin de compte qu’un jugement péjoratif, puisque dire à quelqu’un qu’il agit bien suppose que vous avez aussi le droit de lui dire qu’il agit mal. Aussi j’en suis venu à penser que plus je peux maintenir une relation sans jugement, plus cela permettra à l’autre personne d’atteindre le point où elle reconnaîtra que le lieu du jugement, le centre de la responsabilité réside en elle-même.

Le sens et la valeur de son expérience dépendent uniquement d’elle et aucun jugement extérieur ne peut rien changer à cela. Aussi j’aimerais m’efforcer d’arriver à une relation où je ne juge pas autrui en mon for intérieur. Je crois que c’est là ce qui peut le libérer, faire de lui une personne qui prend ses propres responsabilités. »

Libérer nos relations des jugements – voilà un chemin magnifique qui boostera le libre arbitre, la motivation intrinsèque et la responsabilité de nos enfants. Et ce n’est pas facile !!
Alors comme premier petit pas je vous propose le suivant : commençons déjà à ne plus porter de jugement sur nous-même !!


RECETTE pour BOOSTER votre Immunité et celle des personnes qui vous entourent :

1 - Soyez attentifs aux jugements – positifs ou négatifs – qui émergent en vous quand vous portez un regard sur vous-même.

2 – Petit à petit – quand vous les remarquez – transformez les. Par exemple – si je m’entends me dire
 « Tu as été nulle sur ce projet » - je le transforme en une affirmation qui ne comprend plus de jugement, mais des faits: « ce projet a pris plus de temps que je n’imaginais ».

3 – Quand vous avez suffisamment transformé les jugements que vous vous portez, appliquer aussi aux jugements que vous portez sur les autres..


TESTEZ – et GOUTEZ le fait de voir les jugements disparaître petit à petit de vote vie. Et ainsi – renforcez votre immunité au jugement des autres que vous reconnaîtrez dorénavant comme le miroir des jugements qu’ils se portent à eux même...

CHALLENGE de Juillet

Nous vous proposons un super challenge sur 1 mois :
Etre attentif.ve aux jugements que je pose sur moi-même et les transmuter en faits !

Par exemple : « Je suis colérique - c’est nul » >> ABracadabra >> « J’ai crié ce soir quand Mathieu a renversé son verre d’eau par terre... »

Et venez partager avec nous vos jugements et leur transmutation sur notre groupe Facebook Les Ateliers Gordon.


A très vite,
Nathalie Reinhardt
Fondatrice de l’Association Les Ateliers Gordon
Voici les 10 questions que Carl Rogers nous pose :


1 – Puis-je arriver à être perçu par autrui comme digne de confiance, comme fiable et cohérent au sens le plus profond ?


2 – Puis-je m’exprimer de façon à communiquer sans ambiguïté l’image de la personne que je suis ?


3 – Puis-je éprouver des attitudes positives envers l’autre : chaleur, attention, affection, intérêt, respect ?


4 – Puis-je en tant que personne être assez fort pour être distinct de l’autre ?


5 – Suis-je assez sûr de moi pour permettre à l’autre d’être distinct ?


6 – Puis-je me permettre d’entrer complètement dans l’univers des sentiments d’autrui et de ses conceptions personnelles et les voir sous le même angle que lui ?


7 – Puis-je accepter toutes les facettes que me présente cette personne ?


8 – Puis-je agir avec assez de sensibilité dans cette relation pour que mon comportement ne soit pas perçu comme une menace ?


9 – Puis-je me libérer de la crainte d’être jugé par les autres ?


10 – Puis-je voir l’autre comme une personne en devenir ou vais-je être bloqué par son passé et par le mien ?


#EcouteActive #CarlRogers #ComprendreNosEnfants #LesAteliersGordon #ParentsEfficaces #EducationBienveillante

samedi 6 juin 2020

ÉMOTIONS, DE LA DIFFICULTÉ DE LES ÉCOUTER



By Catherine Dumonteil Kremer

Illustration de Lise Desportes

DIRE BIENVENUE AUX CRISES


« Ça y est, il va faire une crise… Tout le monde va se demander pourquoi je n'interviens pas, pourquoi je suis si laxiste avec lui… Et puis ça me rend dingue qu'il se mette dans des états pareils, il ne pourrait pas me demander calmement les choses ? »

Vous vous reconnaissez dans ce parent démuni face à la énième crise de rage de la semaine ou de la journée ? Cela peut être épuisant, décourageant. Que faire devant ces manifestations d'insatisfaction réitérées ?

De plus, elles peuvent se produire absolument partout : au parc, au supermarché, à la maison pendant un repas de famille…

Tout est possible pour un petit enfant qui n'est pas inhibé par la convention et ses usages et dont le cerveau n'est pas encore suffisamment mature pour différer l'expression de sa colère.


LES ÉMOTIONS, C'EST BON POUR LA SANTÉ !


Revenons tout d'abord sur un préjugé tenace : les émotions sont mauvaises, elles donnent une image très négative de celui qui les exprime, elles sont un signe évident de faiblesse et d'absence totale de maîtrise de soi.

Eh bien non, les émotions sont des alliées précieuses. Janov, entre autres, l'a démontré par son travail de thérapeute : il est bon de les évacuer, elles sont nos ressources naturelles pour guérir les souffrances.

Nos tensions s'évanouissent lorsque nous laissons vivre nos émotions. Et les enfants ne font pas exception à cette règle. L'émotion est une sorte de garde-fou dans un monde parfois hostile aux besoins des tout-petits, qui vivent quelquefois des journées en collectivité à un rythme trépident.

Les tensions s'accumulent alors… Et, en début de soirée, c'est le feu d'artifice émotionnel : ils se roulent par terre, crachent, hurlent, jettent des objets dans toutes les directions, donnent des coups de pied partout et nous ne comprenons pas ce qui nous vaut ce déluge. Mais ils sont simplement en train d'essayer de trouver des solutions en eux.

Et une fois les émotions sorties, ils sont à nouveau les petits êtres aimants, intelligents et coopératifs que nous connaissons.


JE N'ARRIVE PAS À ÉCOUTER MON ENFANT EN CRISE, QUE FAIRE ? 


Oui, mais que faire face à une émotion ? Toutes les émotions ne se ressemblent pas. Et, selon notre histoire personnelle, nous aurons plus ou moins de mal à les accepter.

En gros si nos parents nous frappaient ou nous punissaient lorsque nous nous mettions à pleurer, nous allons avoir énormément de mal avec les larmes.

Si la crise de rage était interdite, dévalorisée, si nous étions isolés systématiquement lorsque nous étions en colère, nous aurons beaucoup de difficultés à faire face à la fureur de nos enfants.

Qu'en est-il pour vous ? Comment vos parents réagissaient-ils ?

C'est une des premières questions intéressantes à se poser pour comprendre nos difficultés à écouter les émotions de nos enfants.

En voici une autre : depuis quand ne vous êtes-vous pas laissé aller complètement à pleurer, à sangloter même ? Comment pourriez-vous retrouver le chemin de vos propres émotions ?

C'est quand j'ai fait ma première crise de rage dans un groupe d'écoute des émotions, que j'ai compris de l'intérieur ce que vivaient mes enfants lorsqu'ils étaient dans cet état-là.

C'est en pleurant abondamment moi-même et en en expérimentant les effets bénéfiques que j'ai compris le processus de guérison à l'œuvre en moi et cela a totalement changé ma vision du monde.

L'effet le plus direct de ce travail, c'est que je me sentais à l'aise face aux pleurs, peurs et crise de rage de mes enfants. Je n'avais plus cette colère, ce découragement, cet agacement qui me dérangeait lorsque j'essayais de les écouter.

PRENEZ EN MAIN VOS ÉMOTIONS ! 

C'est le moment ou jamais, vos enfants vont vous y aider très indirectement, et cela peut vraiment faire évoluer votre façon d'être.

Vous pourriez donc consulter un thérapeute ouvert aux émotions, ou bien travailler au sein d'un groupe d'écoute, et/ou essayer les quelques astuces suivantes :

Hurler dans un coussin


C'est un truc qui a toujours bien fonctionné pour moi.
Le coussin amortit les sons et les pleurs ne sont pas loin derrière la rage.
Faites cela à l'abri des regards, cela pourrait effrayer vos enfants.

Pleurer devant un bon mélodrame


C'est un excellent truc, la prochaine fois que vous aurez envie de pleurer chez vous devant un DVD, sautez à pied joints sur l'occasion, allez-y ! Sanglotez et expérimentez ce que cela peut être de verser des larmes sans se sentir mal à l'aise.

De plus, vous résoudrez quelque chose en vous, même si vous ignorez quoi. Ce film vous fait pleurer parce qu'il fait écho à votre histoire, c'est très complexe de savoir à quoi vous réagissez, mais, ce qui est important, c'est que vous commencez à guérir.

Appelez une amie ou un ami


Choisissez un complice qui sait ce que vous souhaitez faire, qui vous écoutera pleurer ou vous mettre en colère sans vous juger et qui saura accueillir toutes vos émotions.

Ce sont des petits trucs d'urgentiste ! Il y a un travail de fond à faire, c'est certain, mais chacun sent quel est le bon moment pour l'accomplir et, en attendant, vous serez plus détendu et confiant lorsque vous écouterez les émotions de vos enfants.


ET AVEC VOS BAMBINS ? 


Vous les aiderez beaucoup en accueillant leurs décharges émotionnelles. Essayez de ne pas interrompre les larmes, mais soyez là, présent par un contact physique, un regard aimant.

Cela suffit parfois pour se sentir bienvenu dans ce que l'on traverse. Pour ce qui est de la crise de rage, c'est un peu la même chose, restez présent et veillez à ce que vos enfants ne se fassent pas mal.

Lorsqu'ils se roulent par terre, en cognant leur tête et leurs poings contre le sol, votre rôle consiste à mettre des coussins pour les protéger des chocs. Restez là, essayez d'être attentif à ce que vous ressentez afin de pouvoir travailler ultérieurement et, peu à peu, vous vous sentirez de mieux en mieux.

Et n'oubliez pas : il y a une manifestation d'émotion très efficace que nous aimons tous beaucoup vivre : le rire ! Il élimine les tensions en nous de façon radicale et, pour celle-ci, il n'y a qu'une option : se faire plaisir dans l'humour, la drôlerie, le chahut !


Catherine Dumonteil Kremer